Durée du délai de préavis raisonnable de 19 ans
Préavis de 10 mois après des relations commerciales établies de 19 ans
Résumé
Le délai de préavis de 10 mois après des relations commerciales établies de 19 ans est jugé insuffisant. La rupture par le fournisseur du contrat de distribution de produits est jugée brutale, car insuffisant pour permettre au distributeur de se réorienter. Les tribunaux fixe le préavis à 12 mois. Le fournisseur doit indemnisé son ancien distributeur de la brutalité de la rupture et non de la rupture elle-même. Le préjudice est fixé à une perte de marge brute sur deux mois (60 596 euros).
Part du chiffre d’affaires du distributeur avec les produits du fournisseur
Le distributeur réalisait 21% puis 13 % de son chiffre d’affaires avec les produits du fournisseur.
Le délai de préavis raisonnable aurait du être de 12 mois de préavis d’après les juges.
60596 euros de dommages et intérêts pour le distributeur
Le fournisseur est condamné à réparer le préjudice subi par le distributeur, en raison de la brutalité de la rupture car le délai de préavis était trop court. Le préjudice est fixé à une perte de marge brute sur deux mois, soit 60.596 euros.
Préjudices complémentaires
Le distributeur ne produit pas de preuves suffisantes d’un autre préjudice, notamment les investissements spécifiques pour la distribution des produits, la perte d’image auprès d’autres professionnels et le dénigrement du distributeur par le fournisseur.
Rejet des dommages et intérêts pour atteinte à son image
Le distributeur voit rejeter les demandes d’indemnisation complémentaire, en raison de l’absence d’investissements spécifiques pour la distribution des produits du fournisseur, l’atteinte à son image auprès des autres fournisseurs et le dénigrement.
Cour d’appel de Paris, Pôle 5, chambre 4, 11 Février 2015, N° 12/22955 SAS PROVENCE EUROPAGRO SAS COMPO France, Numéro JurisData : 2015-002375
Délai de préavis contractuel de 1 mois insuffisant après 12 ans de relations commerciales
Résumé:
L’entreprise de réparation et de carrosserie automobile doit être indemnisée de la rupture brutale des relations commerciales établies par un groupement de compagnies d’assurances. Le respect du préavis contractuel d’un mois est jugé insuffisant et caractérise la brutalité de la rupture, qui ouvre droit à des dommages et intérêts.
Relations commerciales établies depuis 12 ans
Les deux entreprises ont entretenu des relations commerciales établies, c’est à dire régulière et ininterrompue depuis 12 ans, sous la forme de plusieurs contrats, caractérisant un courant d’affaires continu depuis plus d’une dizaine d’années.
Lettre de résiliation accordant seulement 1 mois de délai de préavis
La lettre de résiliation a ainsi mis fin à des relations commerciales établies d’une durée totale de 12 années de sorte que le préavis d’un mois était manifestement insuffisant.
Le délai de préavis raisonnable fixé à 9 mois par les juges
La juridiction saisie décide que compte tenu de la durée des relations commerciales établies et de l’absence de preuve d’usages professionnels contraires, le délai de préavis aurait du être de 9 mois.
29 820 euros de dommages et intérêts
La période supplémentaire de préavis est donc de 8 mois, le délai de préavis respecté ayant été d’un mois.
Le chiffre d’affaires mensuel moyen de 6 381 euros et la marge brute moyenne de 58,41 %,ce qui conduit à l’indemnisation de la victime de la rupture brutale des relations commerciales établies à hauteur de la somme de 29 820 euros de dommages et intérêts.
Cour d’appel de Grenoble, Chambre commerciale, 29 Janvier 2015, N° 11/05145 SARL EYBENS SPORT AUTO SARL
SA GENERALI IARD, Numéro JurisData : 2015-001471
Rupture abusive et clause « d’irresponsabilité »
Rupture abusive d’un contrat de distribution
Deux sociétés (une de production et une de distribution) concluent un contrat de distribution exclusive
dans un secteur géographique déterminé. La société de production résilie le contrat.
La société de distribution demande réparation, au motif que la rupture est abusive, en prétendant que la faute lourde (tendant au dol) exclut l’application d’une clause limitative de responsabilité.
Clause d’irresponsabilité/d’absence d’indemnisation en cas de rupture
Cependant ce contrat contenait une clause d’irresponsabilité, permettant d’échapper à toutes indemnisations en cas de rupture du contrat, quel qu’en soit le moment et quel qu’en soit le motif.
La cour de cassation approuve la cour d’appel :
« Mais attendu qu’ayant constaté que les dispositions claires, précises et dénuées d’ambiguïté de l’article 15 du contrat, qu’elle n’a pas interprétées, excluent toute indemnisation en cas de résiliation quels que soient les motifs ou l’origine de celle-ci et relevé qu’aucune circonstance de fait ou de droit ne permettait de retenir un éventuel abus dans l’exercice de cette faculté de résiliation ouverte à chacune des parties, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche que ces constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ; »
La clause exclut clairement toute indemnité en cas de résiliation, quels qu’en soient les motifs. De plus, aucun abus dans le recours à cette clause n’est relevé par les juges. En conséquence, la clause produit ses effets et la rupture ne saurait donner lieu à indemnisation.
Cour de cassation, Com., 17 janvier 2012
Rupture brutale et clause de révocation/d’objectif
Une clause d’objectifs motif de résiliation sans préavis du contrat
Des objectifs chiffrés de résultat stipulés dans la clause de révocation
Deux sociétés passent un contrat équivalent à un mandat, pouvant être rompu a tout moment sans indemnités avec un motif sérieux et légitime. Ce contrat comporte également une clause d’objectifs, qui instaure un certain seuil en dessous duquel elle joue le rôle de motif, permettant une résiliation sans indemnités. Le mandant va résilier le contrat du fait de l’insuffisance de résultat, donc sans indemnités, mais le mandataire va quand même demander des indemnités, sur le fondement de la rupture brutale des relations commerciales établies (l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce).
La société Banque privée européenne (la BPE) et la société Hestia finances (la société Hestia) ont conclu le 30 août 2006 un contrat dénommé « mandat d’intermédiaire en opérations de banque » pour une période de cinq ans renouvelable par tacite reconduction et révocable soit à tout moment, sans indemnité, pour des motifs sérieux et légitimes, dont l’insuffisance de résultats, soit sans motif moyennant une indemnité forfaitaire de dix-huit mois de commissions. La BPE ayant révoqué le 22 janvier 2008 le mandat de la société Hestia pour insuffisance de résultats dans la production de crédits et de contrats d’assurance-vie, cette dernière l’a assignée en paiement de dommages-intérêts à titre d’indemnités de résiliation.
La clause de révocation sans préavis pour insuffisance de résultats appliquée en appel
La cour d’appel a relevé que la clause de révocation du mandat pour insuffisance de résultats offrait au mandant la faculté de révoquer le mandat sans indemnité si le mandataire n’atteignait pas au moins 80 % de l’objectif annuel d’une année considérée et que la société Hestia avait seulement réalisé 40 % ou 65 % des objectifs alors que la BPE avait un taux de réalisation de 105 %.
L’application de la clause de révocation fait échec à l’interdiction de la rupture brutale des relations commerciales établies (l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce).
Un manquement grave est nécessaire pour justifier une rupture brutale
La résiliation sans préavis nécessite une faute grave malgré la clause contraire
La cour de cassation casse l’arrêt et exige que soit caractérisé un manquement grave de la société à ses obligations contractuelles justifiant la rupture de leurs relations commerciales sans préavis.
Un arrêt rendu au visa de l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce
La cour de cassation va ici reprocher à la cour d’appel de ne pas avoir caractérisé un manquement grave pour permettre la résiliation sans préavis et sans indemnités. Il semble donc que l’insuffisance de résultat, même prévue contractuellement, ne permettre de résiliation le contrat sans préavis.
Cour de cassation, Com., 9 juillet 2013